lundi 8 octobre 2012

ETUDE OGM / les empoisonneurs


OGM et étude de Séralini mise en doute : l'EFSA est une agence qui s'auto-protège - Le Nouvel Observateur

La vraie question n’est pas celle de l’étude de Gilles-Eric Séralini, c’est celle de la responsabilité croissante de l’autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA).

Un organisme à faible légitimité

D’abord parce qu’un pré-avis, rendu par des non scientifiques fonctionnaires de l’EFSA et deux scientifiques dont on ignore le nom et le parcours, sans aucun débat contradictoire, n’est pas admissible sur le plan déontologique

Ensuite et surtout parce que les critiques sur la méthodologie suivie par l’étude Séralini, à savoir le nombre d’animaux testés, devraient avant tout être adressées à toutes les études que l’EFSA a validé sans exception depuis 10 ans ; qu’en particulier, l’étude de Séralini n’est pas une étude de cancérogénèse mais toxicologique.

Et si elle pose la question de nombreuses tumeurs, où sont les études de cancérogénèse qu’auraient mises en œuvre l’EFSA pour étudier ce point majeur ? Nulle part. On se retrouve comme dans le cas de l’aspartam, où l’EFSA a osé rejeter des études mettant en cause ce produit au motif qu’elles ne remettaient pas en cause l’étude initiale…. qu’ils ont avoué n’avoir pas lue.. à la condition qu’ils l’aient eu un jour…

Enfin parce que, quelles que soient les critiques adressées à l’étude de Séralini, elles illustrent surtout la faiblesse insigne des études validées par l’EFSA et la responsabilité évidente et croissante de cet organisme et de ses experts.

Séralini répond à ses détracteurs



A en croire ses contradicteurs, dont plusieurs sont liés à l’industrie agro-alimentaire, M. Séralini aurait réalisé une étude sans aucune valeur. Il était temps de lui redonner la parole. C’est ce queReporterre a fait, calmement, pour comprendre les arguments scientifiques et revenir à un débat réfléchi.Reporterre - 4 octobre 2012


Le professeur Gilles-Eric Séralini et son équipe scientifique ont publié le 19 septembre dans la revue Food and Chemical Toxicogology une étude concluant à la dangerosité d’un régime alimentaire comprenant un maïs transgénique résistant au pesticide Roundup.
Accompagnée d’une vaste opération de communication (film et livre grand-public lancés au même moment), cette publication a suscité un fort émoi public. Très rapidement se sont déclenchés des contrefeux vigoureux : les critiques se sont multipliées, contestant la valeur scientifique de l’étude. Si certaines émanent de chercheurs honnêtes, avec qui Reporterre est en relation, beaucoup sont mises en scène par le lobby agro-industriel, tandis que des censeurs parmi les plus virulents sont nettement liés à l’industrie chimique.
Dans cette polémique, l’enjeu de la véracité des faits étudiés tend à se perdre. C’est pourquoi il a paru nécessaire à Reporterre de redonner la parole à Gilles-Eric Séralini, calmement, pour connaître ses réponses aux arguments, légitimes mais pas définitifs, que lui opposent ses contradicteurs.
Voici ses réponses :

M. Séralini explique d’abord les grandes lignes de l’étude qu’il a dirigée.
Première question : le contrôle de micotoxines dans la nourriture des animaux étudiés n’est pas détaillé dans l’article publié. A-t-il été bien mené ?
M. Séralini répond que l’expérience a suivi toutes les règles relatives aux"bonnes pratiques de laboratoire" suivies par les établissements d’expérimentation. La composition de la nourriture et la présence des mycotoxines et autres éléments étaient précisément contrôlées. Mais il n’était pas possible d’indiquer tous ces détails dans l’article princeps, c’est-à-dire principal.
Celui-ci devrait être suivi, si l’on comprend bien, d’autres articles détaillant les conditions de l’expérience.
Deuxième question : les groupes témoins de rats mâles et femelles étaient trop restreints dans l’étude, ne comportant que dix animaux. Cela n’enlève-t-il pas la valeur des résultats trouvés ?
M. Séralini répond qu’on peut toujours faire mieux. L’idéal aurait été d’avoir soixante-cinq rats par groupe. Mais c’est impossible [en raison du coût que cela représente, comprenons-nous]. Toutes les études se font habituellement avec des groupes de dix rats. M. Séralini souligne qu’il n’a pas mené une étude de cancérogenèse [c’est-à-dire visant à vérifier si le produit étudié provoque des tumeurs cancéreuses], mais une étude de toxicologie [étudiant des effets toxiques, qu’elle qu’en soit la nature], qui est "la première étape" avant une étude de cancérogenèse. Les normes OCDE pour ces études demandent qu’il y ait dix rats par groupe.
Troisième question : sur dix individus par groupe, la valeur statistique des résultats observés sur les groupes est très faible.
M. Séralini répond que l’on peut dire cela de toutes les études. Il affirme que 98 % des études toxicologiques de recherche portent sur trois à quatre rats par groupe. Et que les études réglementaires sur les OGM, qui ne durent que trois mois [alors que son étude a suivi les animaux pendant deux ans], comprennent dix rats par groupe. C’est d’ailleurs, dit-il, un reproche qu’ont émis les agences réglementaires à l’égard d’un test présenté par la société Monsanto ; mais elles n’ont pas exigé le retrait du maïs transgénique concerné.
Quatrième question : la souche de rats utilisée, Sprague-Dawley, présente des spontanément des tumeurs cancéreuses.
M. Séralini répond que cette souche de rats est utilisée dans presque tous les tests, et c’est en particulier la souche qui a servi pour homologuer tous les OGM. L’étude de M. Séralini a duré plus longtemps, et il est exact que des tumeurs se développent en fin d’expérience. Mais ce qui compte,"c’est le différentiel par rapport au [groupe] contrôle". Et il faut aussi une souche "suffisamment sensible aux tumeurs pour représenter quelque chose de proche de l’humain". Ici, l’étude a montré les perturbations hormonales [induites par l’alimentation comprenant un OGM et le pesticide Roundup].
Par ailleurs, il y a de nombreuses observations sur chaque rat, donc de nombreuses valeurs qui, par des méthodes statistiques complexes, ont permis de mettre en évidence diverses corrélations. Les observations ont été de plusieurs types : anatomo-pathologiques, biochimiques, micro-biologiques, et comportementales.
Cinquième question : d’autres études ont été menées avec des animaux nourris aux OGM sur de longues durées. L’étude dirigée par le professeur Séralini ne serait donc pas exceptionnelle. L’intervieweur produit trois études.
M. Séralini répond que ces trois études ne sont pas toxicologiques. Il précise que l’étude qu’il a dirigé est la plus longue, "vie entière", sur cet OGM, le maïs NK 603. Il souligne qu’il n’existe pas, par ailleurs, d’étude à longue durée sur l’exposition au pesticide Roundup, qui est le plus répandu dans le monde. Des études existent sur son composant principal, le glyphosate, mais pas sur le Roundup en tant que tel.
Sixième question : si les OGM ont des effets aussi néfastes que semble l’indiquer l’étude de M. Séralini, pourquoi ne les observe-t-on sur les animaux et les populations qui consomment des OGM, notamment aux Etats-Unis, depuis plus de dix ans ?
M. Séralini répond qu’il n’y a pas de traçabilité dans ce pays sur les OGM, et que l’on ne peut donc pas y mener une étude épidémiologique sur les aliments transgéniques. Il se trouve qu’on observe énormément de pathologies hépato-rénales. On ne peut pas les attribuer aux OGM et au Roundup, mais les produits mal évalués pour la santé peuvent en être responsables.
Septième question : que se passe-t-il en Argentine et au Brésil qui cultivent à grande échelle les produits transgéniques.
M. Séralini répond qu’il est dommage que seule une petite équipe comme celle qu’il dirige à Caen étudie les effets du pesticide Roundup. Il y a un vrai doute sur la manière dont on évalue les maladies chroniques. Le système hormonal semble perturbé par ces produits. Il est anormal qu’il n’y ait pas d’études à long terme sur ce type de produits.
Propos recueillis par Eduardo Febbro et Hervé Kempf

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